Jorre – The Black Lotus Tattoo Studio

Anversois, Jorre découvre le tatouage avec son parrain docker et tatoué. L’encre bleutée fascine le gamin. Jorre rêve alors de devenir tatoueur. En 1997, à l’âge de 19 ans, Daan Verbruggen lui met le pied à l’étrier. Vingt ans plus tard, passionné par son métier, Jorre encre un tatouage fait pour durer. Passionné par le style japonais, il se consacre désormais à cet art ancestral dans son shop « The Black Lotus Tattoo Studio », à Anvers.

https://www.instagram.com/jorre_blacklotus

Alexandra Bay : Quel est ton premier souvenir de tatouage ?

Jorre – The Black Lotus : J’aime le tatouage depuis l’enfance. Mon parrain travaillait comme docker à Anvers (Antwerpen). Il avait des tatouages de Marin : un aigle sur le torse et un crâne old school sur la main. Je le trouvais super cool. Quand j’ai eu 17 ans, je me suis fait mon 1er tatouage. C’était dans le « quartier rouge » à Anvers. Ce n’était pas un bon tatoueur, mais c’est le seul qui acceptait de tatouer les mineurs… Rires.

A.B. : Est-ce qu’ils y avaient beaucoup de tatoués et de tatoueurs à cette époque ?

Jorre : Quand j’étais petit, il y avait des vieux mecs du quartier rouge qui tatouaient les marins. Il y avait aussi Munpie qui encrait du Polynésien. C’est lui qui a appris le tatouage à Daan Verbruggen. Munpie est l’un des premiers tatoueurs à avoir exercé hors du quartier rouge. Il y a 20 ans, on ne voyait pas beaucoup de tatoués. Il y avait beaucoup de punks et de gens de la scène hardcore. On écoutait du hardcore et du métal. Les gens de ces scènes étaient bien tatoués. À part Munpie et Daan, il n’y avait pas beaucoup de tatoueurs à Anvers.

A.B. : Comment as-tu débuté dans le métier ?

Jorre : J’ai toujours voulu être tatoueur. J’ai suivi une école d’art à Anvers. Je voulais aller à l’académie des beaux-arts pour apprendre à peindre, mais j’ai rencontré Daan Verbruggen. En 1997, j’avais 19 ans et il me tatouait à Daruma Tattoo. Il m’a proposé de devenir son apprenti, alors j’ai arrêté l’école. Je devais nettoyer, souder les aiguilles et tout stériliser. Quand il me restait du temps, je dessinais pour lui. Daan ne faisait que du japonais, alors je dessinais tous les autres motifs pour qu’il les tatoue. Je n’ai jamais beaucoup tatoué avec Daan. Il pensait que je n’étais pas encore prêt. À l’époque, je pensais qu’il se trompait. Je suis parti au bout d’un an. Maintenant, je sais qu’il avait raison.

A.B.: As-tu postulé dans un nouveau shop ?

Jorre : Non, à l’époque, j’avais un pote qui avait un bar à Anvers. C’était une clientèle très spéciale. Il m’a proposé une pièce vide au-dessus de son bar. J’y ai installé mon shop. Il m’envoyait ses clients, c’était que des mecs bourrés… rires… mais c’était une bonne clientèle, car j’ai pu m’exercer. Je leur faisais des prix bon marché et ils ne se plaignaient pas. Je tatouais aussi mes potes. Je pouvais pratiquer le tatouage et m’entraîner. Je suis resté là environ un an.

A.B. : Quand as-tu commencé à tatouer du japonais ?

Jorre : En 2000, j’ai commencé chez Hannya tattoo, à Bruxelles. J’avais entendu que Psychopat cherchait quelqu’un. Shad était parti. Je lui ai présenté mon book et il m’a engagé. C’était très important pour moi, car le shop avait une très bonne réputation. Il y avait une clientèle importante. Dès le premier jour, j’ai eu beaucoup de travail. J’ai dû apprendre le style japonais et j’ai aimé ça. Psychopat m’a aussi beaucoup enseigné. Je n’avais pas trop d’expérience. Il était très patient. J’y suis resté 3 ans. Je faisais le trajet Bruxelles-Anvers tous les jours. J’en avais un peu marre du train. Un pote qui avait un studio à Gérone en Espagne m’a invité. J’y suis resté un an avant de rentrer à Anvers. Ma ville, la famille et les potes me manquaient. J’ai bossé un an chez Munpie puis 5 ans chez mon pote Joe de Glorybound Tattoo !, avant d’ouvrir mon propre shop The Black Lotus, à Anvers.

A.B. : Essaies-tu de maîtriser les codes du style japonais traditionnel ?

Jorre : J’essaie de respecter le plus possible les codes, même si je ne suis pas Japonais et que je ne pourrais jamais tout comprendre. J’essaie de respecter les règles et la façon de dessiner, etc. Je fais du mieux possible. Je lis beaucoup de livres. J’ai toujours deux trois bouquins ouverts lorsque je débute les croquis. Instagram est aussi pratique pour voir le travail des autres tatoueurs. En plus, j’ai Daan qui vient régulièrement en guest à The Black Lotus. Il connaît bien les symboles et m’apprend encore beaucoup de choses.

A.B. : Daan est toujours ton maître d’apprentissage, finalement ?
Jorre : Oui, je ne vais plus nettoyer ses chaussures… Rires… Je ne vais plus faire ça ! Mais, il connaît bien le style japonais. Il a plus d’expérience et il tatoue mieux. Alors, je lui demande de l’aide sur la technique et le dessin. Grâce à lui, je tatoue et je ne l’oublierai jamais. Dans 20 ans, s’il est dans la merde à 5 h du matin, il peut sonner chez moi. Je serais là, car il m’a offert un très beau cadeau : devenir tatoueur.

A.B. : Comme Daan, est-ce que tu ne tatoues que du japonais ?

Jorre : Pour être honnête, j’aime tatouer tous les styles. J’aime surtout tatouer des pièces qui seront encore belles dans 10 ans. C’est une notion importante pour moi. Si on me demande un portrait en couleurs de 4 cm de grandeur, je refuse. Je sais que dans 5 ans, ce sera une belle merde. Ça ne me dérange pas de tatouer un tribal, si je sais qu’il est bien encré et qu’il résistera au temps. Si le client est content, alors, c’est un beau tattoo. Évidemment, si on me laisse tatouer du japonais, c’est un chouette plus. J’aime mon métier avant tout. Je ne suis pas devenu tatoueur pour foirer la vie des gens.

A.B. : Est-ce que « The Black Lotus » était un projet réfléchi ?

Jorre : Oui cela faisait 15 ans que je tatouais et je voulais avoir mon propre shop. Alors, je me suis lancé il y a 7 ans. J’ai deux collègues qui font du bon travail. Kristof (Instagram : @elgatonegro.be) est spécialisé dans le réalisme et Maartje (Instagram : @skinbonesandink) encre du old school et des mandalas. Je peux ainsi me concentrer sur le japonais. Ils tatouent la plupart des clients de la boutique. Parfois, il y a des personnes qui me demandent et j’accepte de tatouer des pièces dans un style différent. J’ai aussi une apprentie Anke. Elle a tatoué quelques potes. Elle est très motivée et dessine très bien. Ce n’est pas une fainéante. Elle est bosseuse et très attentive. C’est rare que je lui explique 2 fois les choses.

A.B. : Quels sont les tatoueurs dont tu admires le travail ?

Jorre : Il y en a beaucoup ! En Europe, j’aime beaucoup Amar Goucem (Instagram : @amargoucem) et forcément Daan Verbruggen (Instagram : @namakubitattoo). En Nouvelle-Zélande, j’aime le tatouage de Dean Sacred (@greyghost). En japonais, j’apprécie le travail de Miyazo Tattoo (Instagram : @myztat). Filip Leu fait du japonais qui est loin d’être traditionnel et c’est vraiment terrible. En contemporain, j’aime beaucoup Gakkin et j’ai un tatouage de Gotch ! Ils ont tous des styles qui fonctionnent et vieillissent très bien.

A.B. : Et dans les plus jeunes ?

Jorre : En Belgique, on avait Alex Vuillot de la Main Bleue. Il est décédé maintenant. Je le connaissais quand il ne tatouait pas encore. J’ai fait son 1er et 2e tattoo. Je l’ai vu débuter. Très rapidement, c’est devenu un tueur. Il est décédé beaucoup trop tôt, car il aurait pu aller très, très loin dans la scène mondiale. Les jeunes évoluent beaucoup plus vite. Le matos est plus facile à trouver. Si tu as la bonne motivation, tu peux y arriver plus facilement qu’il y a 20 ans.

Guest régulier chez « The Ace’s Tattoo Shop », à Ozoir-la-Ferrière

The Black Lotus Tattoo Studio

Minderbroedersrui 57,

2000 Antwerpen,

Belgique

Instagram : @jorre_blacklotus

@theblacklotusantwerp

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Alexandra Bay

+++ Auteure de LOVE, TATTOOS & FAMILY, (ISBN : 2916753214) +++ Co-Fondatrice de FREE HANDS FANZINE +++ TATTOW STORIES +++