J’ai animé des ateliers de tatouage les samedis 26 novembre et 3 décembre, au sein de 3 bibliothèques de Pantin Est. Sur le thème des « métamorphoses du corps », on m’a convié à intervenir auprès d’un public d’enfants de 8 à 12 ans.
Ateliers de tatouage : retour sur une expérience riche en enseignements
J’ai animé des ateliers de tatouage les samedis 26 novembre et 3 décembre, au sein de 3 bibliothèques de Pantin Est. Sur le thème des « métamorphoses du corps », on m’a convié à intervenir auprès d’un public d’enfants de 8 à 12 ans. J’ai découvert les bibliothèques et les équipes très sympathiques de Romain Rolland, Elsa Triolet et Jules Verne. 3 lieux qui se sont révélés différents tant par la structure que par l’environnement.
Un atelier de tatouage pour les enfants
Sur les conseils de la médiathèque de Béziers, l’ensemble de Pantin Est m’a demandé d’intervenir au cours de plusieurs ateliers de tatouage. Cependant, il ne s’agissait pas d’exposer mes photographies sur les parents tatoués « Love, Tattoos & family », mais plutôt d’animer un atelier ludique pour les enfants. Ce qui me convenait parfaitement. En effet, j’avais déjà animé des ateliers de tatouage à la médiathèque de Lieusaint. Cette expérience m’avait beaucoup plu. Aussi, j’étais parfaitement motivée à recommencer.
Lecture Les histoires de l’Oncle Tatoo
Maman, j’ai pu tester mes compétences de conteuse plus d’une fois. Grâce à la lecture du livre « Les histoires de l’Oncle Tatoo », j’ai souhaité introduire un petit temps de réflexion. De jolies histoires colorées pour encrer l’idée d’un tatouage mémoire. Un tatouage qui fait partie du mythe personnel. De plus, ce livre transmet l’idée qu’il existe des valeurs plus importantes que la richesse ou l’apparence.
Sages comme des images
J’avais des craintes quant au fait d’arriver à captiver les enfants. Cependant, l’association projection vidéo et lecture a très bien fonctionné. De plus, j’ai joué sur l’intonation de ma voix et ça m’a permis de retenir leur attention. Ils sont restés sages comme des « images ». Certaines mamans participaient à l’atelier « Elsa Triolet ». L’une d’entre elles s’est esclaffée tout au long de la lecture. Cela m’a beaucoup amusé. Ça m’a fait plaisir quand elle m’a remercié pour cette lecture « captivante ».
C’était la 1ère partie des ateliers de tatouage. Celle qui explique comment naît « parfois » l’idée d’un motif de tatouage. Cependant, il est difficile de généraliser. Surtout, il est bien trop complexe d’expliquer chaque démarche de tatoué(e).
Histoire ludique du tatouage
Une histoire du tatouage au XXe siècle
Lors du 1er atelier, j’avais prévu une projection vidéo de l’animation de Julien Croyal « Une histoire du tatouage au XXème siècle ». En effet, l’animation décrit parfaitement l’histoire du tatouage en Europe, aux USA et en Asie. Cependant, elle ne collait pas à l’esprit ludique des ateliers tattoos. Il était compliqué de mettre des mots sur le déroulement de l’histoire du tatouage en 2 minutes.
Il était difficile d’expliquer avec des mots simples la signification des motifs de tatouage des bagnards ou des prisonniers russes. Aussi, j’ai décidé de ne pas projeter cette animation aux ateliers de tatouage : Elsa Triolet et Jules Verne.
Les marins et Sailor Jerry
Si l’animation était superflue, j’ai tenu à partager une tranche d’histoire essentielle du tatouage. La description de la pratique du tatouage par John Cook. Il est le premier navigateur à avoir nommé cette pratique dans ses livres. De plus, le tatouage des îles du pacifique s’est propagé au-delà des océans. Aussi, je souhaitais leur présenter cette pratique traditionnelle du tatouage.
Cependant, les ateliers de tatouage étaient axés sur un style que j’affectionne particulièrement : le traditionnel Américain. Il me semblait indispensable d’évoquer l’invention du dermographe, mais aussi l’histoire du célèbre tatoueur Sailor Jerry.
Le tatoueur a largement contribué à l’évolution d’une pratique moderne du tatouage. Ensuite, j’ai rebondi sur l’influence des marins quant à la popularité des tatouages. Puis j’ai conclu avec les symboliques fortes qui sont liées à leurs nombreux voyages.
J’ai offert aux enfants plusieurs fiches reprenant des symboles classiques: l’ancre, la sirène, l’hirondelle et l’étoile nautique. Les fiches reprenaient l’histoire du tatouage et la signification de ces symboles.
Création du tatouage
La 2ème partie des ateliers de tatouage était une mise en pratique. Comment se concrétise le tatouage à partir d’une idée ? L’importance de la symbolique ou de la signification personnelle d’un tatouage.
J’ai trouvé important d’expliquer aux enfants tout le processus créatif : du dessin sur calque à la pose du transfert sur la peau. J’avais donc demandé à Pantin Est d’acheter du papier-calque ainsi que du papier-transfert. Par souci de réalisme, j’avais aussi demandé du gel pour la pose du « stencil ». On disposait donc de tout le matériel indispensable : ciseaux, crayons, feutres, etc.
Le choix des motifs
À la bibliothèque Romain Rolland, j’ai adoré les réactions des enfants à la vue des dessins de Sailor Jerry : « beurk les seins de la sirène » – qui étaient pourtant cachés par de jolies étoiles. J’avais laissé le choix des motifs aux enfants.
Cependant, l’ancre et la sirène étaient bien trop complexes à reproduire. Aussi, pour les ateliers suivants, j’ai imposé l’étoile nautique, plus simple à reproduire. De plus, elle plaisait autant aux garçons qu’aux filles.
Il nous restait du temps à consacrer au dessin, aussi les enfants pouvaient choisir d’autres motifs. D’ailleurs, à la bibliothèque Jules Verne, une petite fille a décalqué les cœurs d’un vieux flash vintage du livre « TATTOOS » d’Henk Schiffmacher. J’ai également expliqué aux enfants deux démarches d’artiste ou artisan tatoueur : le free hand et le flash tattoos.
Free Hand et flash
Je pense que ça a été la partie préférée des enfants. Attentifs, ils ont été réceptifs aux instructions et très productifs ! Sans compter les enfants qui avaient déjà anticipé les ateliers de tatouage en choisissant un motif qu’ils souhaitaient reproduire.
À la bibliothèque Romain Rolland, une petite fille m’a demandé de l’aider à reproduire une main supportant un système planétaire. Très jolie idée ! Si j’ai souhaité canaliser les enfants sur l’étoile nautique, l’idée était surtout qu’ils s’amusent.
Le transfert déroutant
La pose du transfert a été un exercice forcément périlleux. En effet, c’est la première difficulté à laquelle se confrontent les apprenti(e)s tatoueurs. J’avais expliqué le process au personnel de bibliothèque qui, je pense, s’est beaucoup amusé. Ainsi, ils ont pu constater la difficulté du geste : pas trop de gel, éviter de bouger le transfert à la pose.
C’était amusant et parfois une déception pour les enfants qui avaient trop bougé. Ce n’était pas grave, nous recommencions dans la bonne humeur ! L’occasion aussi de passer au free hand, soit le motif à main levée. Certains enfants se sont vraiment pris au jeu, comme notre future tatoueuse Nipuni (ce qu’elle m’a confié), qui a dessiné une magnifique ancre à main levée ! Impressionnant.
Concrétisation du tatouage
De la création à l’encrage, j’ai trouvé nécessaire d’aboutir les ateliers de tatouage sur une partie plus technique. Comme un passage à l’acte. L’idée n’était certainement pas de leur apprendre à tatouer, mais surtout d’appréhender le tatouage dans son ensemble.
Ce fut d’ailleurs rigolo, car les enfants étaient particulièrement effrayés par le dermographe en marche. Heureusement, un enfant plus courageux osait approcher sa main et voyait bien que la pique sans faisceau d’aiguilles ne faisait pas mal.
Pour les ateliers de tatouage, j’avais apporté du matériel de tatouage. Je suis tatouée et passionnée de tatouage depuis 20 ans. Comme de nombreux passionnés, j’ai acheté des machines ou des copains tatoueurs m’en ont offert. Pour autant, je n’ai pas du tout envie d’être tatoueuse. Être une passionnée par l’histoire et l’art du tatouage me suffit amplement.
Présentation du dermographe
J’ai donc préparé une table avec tout le matériel : deux dermographes différents, une aiguille dans un tube, un godet à encre, des gants, une bouteille d’encre, une alimentation et une pédale. J’avais connecté seulement l’un des deux dermographes, sur lequel j’avais retiré la buse pour laisser apparaître la tige. Il était assez facile pour les enfants d’imaginer en voyant cette tige s’animer que le tatouage pouvait être assez douloureux.
Évidemment, j’avais réglé la tension assez forte pour que le va-et-vient soit plus rapide. Certains ont osé poser leur main sous la tige et d’autres étaient réticents. J’essayais de leur faire tester la pédale ou mettre les gants pour que la peur s’estompe. L’un des dermographes avait les bobines de cuivre assez visibles pour expliquer rapidement la conductibilité de l’électricité aux enfants.
Encre noire dégoulinante
Pour s’amuser, j’ai même versé de l’encre noire dans un godet. Puis, j’ai trempé la tige pour leur montrer un traçage de trait approximatif sur la peau. Cela a fait beaucoup rire les enfants, surtout lorsque j’ai renversé de l’encre sur la table.
Toutefois, il s’agissait de leur expliquer l’action de tatouer sans rentrer dans trop de détails techniques. Cette partie a été plutôt courte. Cette présentation visait seulement à rendre le processus concret.
Remerciements
Je remercie chaleureusement les équipes des bibliothèques qui se sont mobilisées pour la mise en place de ces ateliers de tatouage. Elles font preuve d’un investissement incroyable auprès des enfants. Elles assurent un vrai lien social et culturel avec les habitants de leur quartier. Les lieux étaient tous différents, mais l’énergie qui s’est dégagée des échanges était la même.
Un échange riche et authentique qui a nourri mon envie de partager toujours plus au sujet de cette culture.
Photos des ateliers de tatouage à la Bibliothèque Jules Verne. @Chuck Ersatz. Tous droits réservés.
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