L’Amsterdam Tattoo Museum connaît une situation particulière et je souhaitais partager leurs difficultés. En effet, peu de gens savent vraiment ce qui s’y passe actuellement. Quelques amis sont allés visiter le « vrai-faux » musée alimentant les recettes de la société qui détient la collection d’Henk.
À l’automne 2011, Henk a ré-ouvert le musée dans une magnifique maison sur trois étages (environ 1000 m2). Un espace assez grand pour présenter sa collection personnelle sur l’histoire du tatouage : machines à tatouer, flashs, peaux humaines, etc. Henk avait également emménagé un espace pour tatouer et une librairie avec tous les livres de référence dans la matière.
Rentrons maintenant dans les détails avec le texte rédigé par le staff sur le blog officiel du Amsterdam Tattoo Museum. (Je remercie Emilie Cantin pour la traduction).
Texte rédigé par Alexandra Bay et publié sur Inkage en 2013
Lettre du Amsterdam Tattoo Museum – Le 25 novembre 2012
“Chers amis,
Tout d’abord, nous sommes submergés par le soutien que nous recevons du monde entier. Nous ne pourrons jamais assez vous remercier. Voici l’histoire du musée et une explication de la situation actuelle.
Henk a collecté tout ce qui avait trait au tatouage depuis plus de 35 ans, il a engrangé beaucoup de connaissances sur l’histoire du tatouage et est passionné par son héritage, surtout de nos jours, alors que n’importe qui peut s’acheter une machine sur Internet et commencer à tatouer sans s’y connaître un minimum.
Après la fermeture du petit musée dans le quartier rouge d’Amsterdam, Henk avait toujours le souhait de présenter sa collection au public. Il rencontra par hasard une femme, Madame Jeannette, qui s’était enrichie grâce à son agence de réintégration de chômeurs “longue durée” sur le marché du travail. L’idée de coopérer naquit. Avec le bénéfice de son agence, elle paierait le loyer du musée pendant les dix premières années ainsi que les salaires.
En échange, le musée donnerait un emploi aux personnes de son agence. Ainsi, elle pouvait continuer à percevoir des bénéfices. À cause du manque de temps et en toute bonne foi, nous commençâmes à monter le musée sans contrat écrit. À l’ouverture de celui-ci l’année dernière, le contexte était devenu assez tendu et le climat politique avait changé.
Plus aucun budget ne fut accordé et reversé aux projets de réintégration des chômeurs et l’agence ne faisait presque plus de bénéfices. Tous les profits provenant du musée étaient reversés à son agence pour qu’elle puisse payer le loyer et les salaires. Bien sûr, ce n’était pas suffisant. Il s’agit d’un musée. Les factures non payées s’accumulaient et la pression se renforçait.
Les petites discussions se transformaient en disputes et le fait qu’il n’existe pas un contrat solide n’a pas aidé non plus. Entre-temps, des membres du bureau partirent, d’autres abandonnèrent à cause des négociations houleuses et des accusations personnelles. Au bout d’un moment, les nouveaux membres du bureau qui composaient l’Amsterdam Tattoo Museum décidèrent d’arrêter la coopération avec l’agence de Mme Jeannette à cause de la manière déplaisante dont les réunions se déroulaient.
Puis, la semaine dernière, nous reçûmes une lettre de Mme Jeannette nous informant que nous étions bannis du musée. Henk, Louise, ses enfants, le bureau, les employés et l’équipe. On nous donna 14 jours pour enlever la collection d’Henk du musée. Que va-t-il se passer désormais? Nous sommes en pleine négociation avec différents partenaires. Le plus important est de récupérer la collection d’Henk.
Nous espérons pouvoir rester au Plantage Middenlaan, mais il se peut que nous ayons à chercher ailleurs. Une chose est sûre : nous avons besoin d’argent. Pour que nous puissions récupérer l’ancien musée ou en mettre un nouveau en place quelque part à Amsterdam. Nous avons foi en nous. Surtout, lorsque l’on voit le soutien international que nous avons reçu de la part de la grande famille du tatouage !
C’est vraiment énorme ! Il y a beaucoup de dons, petits et grands, des gens qui font des t-shirts, des ventes aux enchères de machines à tatouer, et d’œuvres d’art, des évènements tattoos organisés à l’honneur du musée… C’est fou !
Nous mettrons la liste de tous ces bienfaiteurs sur le site. Si vous-mêmes manquez d’infos ou souhaitez organiser des évènements pour collecter de l’argent, faites-le-nous savoir !
Merci de tout cœur pour tout votre soutien, vos dons et l’aide apportée.En espérant vous accueillir bientôt dans notre musée,
L’équipe du Amsterdam Tattoo Museum.
Alexandra Bay : Bonjour, Annemarie. Merci beaucoup de m’accorder cette entrevue. Pourrais-tu te présenter et me parler de ton rôle au musée d’Amsterdam ?
Annemarie : Bonjour Alexandra, Je vais essayer de répondre à toutes tes questions. Tout d’abord, j’ai rencontré Henk en 1991, alors que j’étudiais le japonais à l’université de Leiden. Ma thèse portait sur le tatouage japonais et l’influence de Kuniyoshi. Mon professeur s’appelait Van Gulik, auteur du livre « Irezumi : l’évolution de la dermographie au Japon ».
Il me présenta à Henk. Ce dernier me recommanda auprès d’Ed Hardy qui m’emmena voir Horyoshi III au Japon. Lorsque je finis mes études, Henk me demanda de diriger son premier musée dans le quartier rouge. Ce musée est désormais fermé depuis 2000 et lorsque Henk s’apprêta à ouvrir un nouveau musée, il me demanda de travailler sur le projet. Voilà pour moi et Henk.
Emilie a traduit en français l’article de votre blog du 25 novembre 2012 intitulé « What’s happened » pour informer les personnes qui ne connaissaient pas la situation du musée. Comment la situation a-t-elle évolué depuis ?
La situation au musée est toujours très compliquée. La femme qui était censée être notre pygmalion a fait faillite. Il y a désormais une personne désignée comme tutelle dans le musée et ils sont toujours en train de chercher à qui appartient quoi.
Pendant ce temps-là, nous ne pouvons toujours pas rentrer dans le musée ou récupérer la collection d’Henk. À chaque fois, ils reportent la date à laquelle nous sommes censés la reprendre à cause de nouvelles difficultés. Cette situation ne devrait durer plus d’un mois.
Vous avez beaucoup voyagé pour participer à des événements caritatifs qui vous concernent. Ces collectes ont-elles permis de régler vos problèmes financiers ?
Grâce à tous les fonds collectés autant par des personnes que par de gros événements tels qu’il y a eu à Paris, Antwerp, Sacramento et beaucoup d’autres villes encore, nous avons pu nous offrir les services d’un avocat. Ce fut une étape cruciale, car nous ne voulions pas perdre la collection d’Henk tout ça à cause de complications judiciaires.
Nous espérons bien la récupérer de manière légale et sûre. D’ailleurs, nous avons pu financer un magasin en l’honneur du musée. Ainsi, nous y proposons un grand choix de livres et également un studio de tatouages. Toute l’administration du musée s’y trouve aussi. Sans l’aide de la grande communauté du tatouage, cela n’aurait pas été possible.
Nous nous en rendons compte tous les jours et sommes très reconnaissants de tous ces dons ! Nous avons toujours besoin d’aides financières, car nous recevons toujours des factures de l’avocat. Si nous voulons ouvrir un autre musée, il nous faudra collecter assez d’argent pour le loyer d’un nouveau local, les rénovations, etc. Vous pouvez faire un don en devenant un membre bienfaiteur de la Blue Bone Society https://tattoomuseum.wordpress.com/
Est-il envisageable de restaurer les échanges avec l’agence afin de résoudre cette situation ? Comment se fait-il que l’agence exploite la collection d’Henk et vous empêche d’accéder au musée ?
Nous n’avons pas de contact direct avec l’agence ou la femme qui nous ont expulsés. Nous ne comprenons pas comment cela peut être légal, mais la police elle-même refuse de nous laisser entrer. Cela s’appelle une « intrusion » et, si la personne qui loue l’endroit ne veut pas que vous y entriez, elle a tous les droits.
La situation absurde actuelle est qu’aucun des deux propriétaires, celui du bâtiment ou celui de la collection d’œuvres d’art, n’est autorisé à entrer dans le local. C’est la personne qui le loue, sans payer le loyer, qui peut y accéder. Voilà pour la loi allemande. Avec cette agence, il n’y aura jamais de résolution de conflit et de toutes les manières, on ne veut plus jamais rien avoir à faire avec elle.
Comment s’est dérouléE votre recherche d’un nouveau local pour le musée ? Êtes-vous bien installés ?
Nous sommes toujours à la recherche d’un super local pour le nouveau musée. Ce n’est pas facile et nous ne voulons pas nous précipiter. Pour l’instant, nous sommes au Van Woustraat ; c’est temporaire, mais c’est plutôt une bonne solution.
Quelle est la prochaine étape maintenant ?
Nous attendons toujours de récupérer toutes nos affaires de l’ancien musée et sommes toujours à la recherche de soutiens financiers et dons pour recommencer dans un autre musée ! Merci !
facebook.com/SoutienAuAmsterdamTattoosMuseum
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